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elfounet
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Message par elfounet »

Justine : la nouvelle
Introduction
" La petite s'est suicidée ce soir. Éteinte la lumière. Éteinte la vierge. Et les flammes qui allumaient à son cierge". Waouh. J'étais en train de lire ce fameux roman de ce mec qui s'était suicidé juste après avoir fini son manuscrit et dont tout le monde parlait à la télé. Waouh, si vous aviez pu le lire ce roman, sûr que vous auriez aimé. Un truc comme ça, c'est obligé que ça laisse des traces, obligé. Bon, j'étais là au creux de mon lit à m'imaginer ce que ça ferait d'être un héros de roman et tout quand je me suis mis à penser sur ce qu'avait été ma foutu vie jusque là et surtout, surtout, j'arrêtais pas de penser à cette fille que je venais juste de rencontrer à l'école - suis au lycée, en seconde, et la fille, une nouvelle, elle s'appelle Justine- et qui était tout ce qu'un gars comme moi voire n'importe quel gars avait jamais rêvé à propos d'une fille. Ouais. Justine était sacrément différente. Pas comme toutes ces autres ahuries qui pensent qu'à leur tonne de maquillage qu'elles se foutent sur leur figure ou bien qui aurait le privilège de se faire remarquer par tel ou tel crétin de la classe.
Justine elle s'en fichait pas mal de tout ça. Comment dire, quand elle marchait y'avait comme une sorte de grâce qui émanait d'elle et tout. Et le pire, c'est que cette même grâce, elle était tout le temps avec elle, et quand je dis tout le temps, c'est tout le temps. Même à la cantine où tout le monde s'arrange pour se dégueulasser le veston tricoté avec amour par sa maman, eh bien elle, elle mangeait si délicatement qu'on aurait dit que la nourriture volait dans l'espace, comme en apesanteur, et ce, jusqu'à sa bouche. Bien sûr, j’me rends bien compte que comme je le dis là, ça a pas l'air terrible mais bon dieu, si vous aviez pu la voir, sûr que vous seriez d'accord avec moi. Le plus étrange, c'était que quoi qu'elle faisait, elle semblait jamais heureuse. Jamais. Y' a toujours un moment dans la journée où y'a un truc qui est sensé nous faire rire -un type qui tombe dans la rue, un gars qui se fait prendre un baffe par une femme ou un type qui se fait engueuler par la maîtresse, ouais, même ça ça me fait rire- mais elle, j'la voyais jamais sourire, toujours super triste et tout.

En fait je crois qu'elle pleurait souvent parce que chaque fois que je la regardais elle se séchait les yeux et la voir faire ça, c'était à vous crever tous les cœurs du monde. Et donc le mien. Et c'est là où j'suis tombé amoureux d'elle. Souvent j'imagine que quand on sera grand on vivra dans une super campagne dans un coin reculé du monde entier où plus personne pourra plus jamais la faire pleurer. On habitera tout en haut du colline et le matin y'aura toujours du soleil sur le côté du lit où elle se réveillera. Bien sûr, on aura un chien et des tas d'animaux et tout. On sera sacrément heureux. Et après on aura tout plein de gosses partout et qui courront dans les plaines et dans les bois et qui plus tard, nous amèneront leur gosses à eux aussi. Tous les jours j'lui rapporterai des tonnes et des tonnes de fleurs. Bien sûr, y'aura -forcément- une guerre, mais nous on sera pas séparé. Les bombes tomberont partout sur la colline et autour de la ferme mais nous on s'en foutra, on se passera juste de la musique, et on montera le son au maxi pour couvrir le bruit des bombes et on se serrera super super fort l'un contre l'autre, et on mourra comme ça, en s'regardant dans les yeux, super amoureux et tout.

L'autre jour, on était en cours de sport et le prof a décidé de nous mettre ensemble pour faire des équipes de deux pour le badminton -le badminton, waaah, ça, si c'est pas un truc de fille... Enfin bref, c'est la première fois où je lui ai parlé. Après la classe -et comme le courant passait plutôt bien entre nous - je lui ai demandé si je pouvais la raccompagner chez elle et elle a accepté. Waouh, vous dire comment j'étais heureux j'pourrais sûrement pas, mais croyez-moi je l'étais sacrément. Sur le chemin de chez elle, on a parlé de tout et de rien et quand elle m'a dit au-revoir, j'voulais pas la quitter, rester avec elle, comme ça, à discuter, toute ma fichue vie. A parler de ce qu’elle voudrait, elle. Alors elle m'écouterait débiter mes conneries simplement parce qu'elle serait amoureuse de moi. Ce fut là l'un des plus beaux jours de toute ma vie. Sur le chemin du retour, j'arrêtais pas de penser à ce qu'elle m'avait dit, que le soir quand le soleil se couchait, elle se levait de son lit et écrivait des tas et des tas de poèmes. Sûr qu'elle voudra jamais me les montrer, mais bon dieu, si je pouvais lui en écrire, rien qu’un ou deux, juste pour lui montrer que moi aussi, j’sais écrire des poèmes et tout. A coup sûr ça donnerai des trucs comme ça...
Et j’appellerai ça L’amour-eux.
L'Ado-Naissance
Y'avait du gris partout qui soufflait sur les murs. Super triste et super froid. C'était comme si tout vivait puis mourait d'un seul coup dans cette fichue société-là. Dans cette ville-là je veux dire. Il devait être à peine dix-huit heure et Justine rentrait de l'école. C'est elle qui me l'a raconté - je l’avais pas raccompagné cette fois-ci par j’étais malade, une grippe si vous voulez savoir. Elle m'a dit que, chaque soir, à chaque fois qu'elle rentrait chez elle, comme ça, toute seule, comme un p'tit moineau de rien du tout, elle se sentait comme isolée de tous le monde, tout l'temps perdue et tout. Paumée quoi. Elle avait tout juste dix-sept ans -comme moi- et bon dieu, on le voyait trop bien que quand elle marchait, c'était comme la jeunesse innocente qui se brûlait, qui se crevait dans sa solitude et tout. Elle avait jamais connu l'amant, jamais éprouvé le moindre sentiment. C'était l'ado-naissance dans toutes les grâces de sa puissance, l'effervescence sans l'offense et tout ça, tout ça sous ses pas qui piétinaient ses larmes de sang, à jamais déchirées de toute son obéissance.
Et puis y'avait les oiseaux dans le ciel qu'elle me disait, sûr qu'elle aurait voulu les rejoindre, voler tout là-haut et tout et voir le monde comme il est beau et courir à en perdre haleine sur les couleurs vertes et rouges et bleues et jaunes et roses de l'arc-en-ciel. Alors c'est là qu'un des oiseaux multicolore a brusquement surgit dans ce monde si noir si blanc. Il déchira le ciel, et comme un papillon sur une épaule, alla se déposer, vous devinerez jamais où : juste devant un banc où y’avait un gars et sa nana qui s'embrassaient et tout. Ouais. Ils étaient deux, amour-eux, enlacés et tout et tout. Leurs mains, leur bouche, leurs lèvres, putain, on aurait dit qu'ils s'embrasaient comme un seul feu et que ce même feu il parcourait chacune des veines de leur corps. Elle, elle était blonde comme une déesse de la grèce qui aurait eut des cheveux d'or et tout, et lui, lui c'était un de ces supers beaux gars brun, un sacré foutu prince charmant qu'on lit dans les contes quand on est tout petit pour nous endormir et tout -et ce, même si on n‘a pas sommeil. Alors Justine, ce qu’elle a fait, c’est qu’elle est passée, comme ça, devant le gars et sa nana, sans même les regarder, je veux dire, ces damoiseaux et damoiselle de la ville.

Justine vivait chez ses parents. A ce qu’elle me disait, ça se passait pas toujours super bien. Ce soir-là, quand elle est rentrée, elle avait pas posé la main sur sa poignée de sa porte d’entrée qu'on entendait du millième étage -au moins- les cris de ses vieux. Alors Justine, ce qu'elle a fait Justine, c'est qu'elle a couru jusque dans sa chambre et elle s’est jetée sous les couvertures et vite vite elle a monté le son de la télé pour plus les entendre, ses vieux. Elle regardait la téloche sans vraiment la voir parce que le film qui passait, il était tellement romantique que Justine, elle s'imaginait que justement, c'était elle dans les bras de l'autre, du héros toujours super beau je veux dire. Dans ces moments-là Justine était à fleur de peau. A fleur de vie aussi. Et vachement mélancolique et tout. Elle se créerait un monde nouveau où tout serait beau, une bulle magique et indestructible pour se protéger de toute ses solitudes et où elle s'inventerait des histoires d'amour sous perfusion et tout. C'était comme un endroit mystique où elle tuait et criait à toutes ces tempêtes qui hurlaient dans sa tête. Et puis, seule dans sa chambre, et sous les étoiles, la musique à fond dans ses veines, elle s'agenouillait et priait. Et ce soir-là, c’est exactement ce qu’elle a fait. Elle m’a dit qu’elle priait pour une vie nouvelle. Et meilleure. Elle priait pour les bijoux providentiels, pour la gloire éternelle et le fait d'être une méga star super aimée de tout le monde où tous seraient à ses pieds et devraient satisfaire à ses moindres désirs et besoins. Elle rêvait d'amour. Elle rêvait d'un monde sans bombes, sans tombes.

Alors c'est là que vient la nuit. Y'a Justine toute seule, recroquevillée et qui s'est endormie. Mais au milieu de cette même nuit, elle se réveille pour pleurer et crever ces putains de cicatrices qui la consument de l'intérieur un peu plus chaque jour et chaque nuit. Elle mime plein de gestes, comme si elle avait un amant qui lui donnait des tonnes de baisers interdits et tout. On voit même ses lèvres bouger comme si elle l'embrassait, l‘amant invisible je veux dire, comme si elle s'enlaçait dans son corps et qu'ils se serraient forts, super fort dans les bras l'un de l'autres. Waouh, c'était drôlement triste et émouvant -et beau aussi- de la voir comme ça, surtout qu'a à un moment donné - et c'était obligé- elle a ouvert les yeux et elle s’est rendu compte de la réalité. que tout ça, que ce fameux amant, eh ben, il existait pas, et qu'il y avait rien que du vide entre ses bras. Je dis bien rien que du vide. Et puis c'est à moment qu'elle a fait ce truc terrible auquel je m'attendais pas. Ce qu'elle a fait, c'est qu'elle a mis ses bras en croix -elle était à genoux sur son lit, le corps en arrière-, et là, elle s'est mise à parler tout haut, comme une sorte de prière ou quelque chose comme ça. Justine, elle se sanctifiait à l'amour, c’était clair. Elle disait que tout ça, tout ces cadavres humains, ces meurtriers en libertés, tout ça, elle n'en voulait plus. Qu'elle n'en pouvait plus. Que elle aussi elle avait droit à son nuage de bonheur; Et c'était vrai. On a tous droit au bonheur. Surtout Justine.
Vous trouvez pas ?

Les Amour-Eux
Justine était trempée. Sa solitude était encrée au plus profond de sa chair. Indélébile. Ca la crevait. Ca se voyait que trop bien. Elle n'attendait plus rien. Plus rien de son histoire. Sinon l'épilogue, la fin. Ce soir-là, la nuit était tombé sur le lac endormi, gelé à ce terrible hiver qui se déposait en perles de neige sur les étoiles et sur les pétales qui bordaient le lac. Je m'étais caché dans la petite forêt qui entourait l'eau et tout. J'étais une saleté d'espion, je le savais mais je m'en foutais. Tout ce que je voyais ce soir c'était Justine. Elle faisait les quatre cent pas et quelque fois s'asseyait pour contempler le crépuscule orangé.
Les fleurs étaient comme recouvertes des gelures de l'hiver, on aurait dit qu'elles pleuraient Justine et tout. Waouh, c'était comme si c'était une fée enchanteresse et qu'elles leur parlaient. Elle leur aurait demandé se baisser, de se courber rien que parce que elle, elle se sentait pas bien, genre seule, abandonnée, sûr que les fleurs l‘auraient fait, de se courber je veux dire. Elle s'est alors allongée sur l'herbe encore tout humide de la neige qui était tombée cet après-midi là. Pour preuve, y'avait encore plein de flocons partout dans ses cheveux et ça faisait comme si c'était une princesse avec une couronne de cristal ou quelque chose comme ça. Ca se trouve, c'en était réellement une. Ces choses-là, on peut jamais vraiment savoir. Alors je la regardais. Elle pleurait des fleuves et des fleuves de larmes et même moi qui suis pas trop un gars qui pleure -ça fait trop gamin, vous comprenez- ça me faisait monter des trucs bizarres dans les yeux, comme de l'eau si vous voyez ce que je veux dire.
Bon sang, c'que j'aurais pas donné pour la serrer dans mes bras, faire comme si j'étais un de ces foutus héros qu'on voit dans les films au cinéma, arriver derrière elle et puis la rassurer et tout. C'est à ce moment précis où je pensais à ces conneries-là que je la vis ôter ces chaussures. Elle était pieds nus, comme sur le seuil de la mort, belle, solitaire et prête à traverser le styx de son enfer. Alors elle s'est avancée tout doucement vers l'eau -elle était sacrément froide, l'eau- et puis, corps et âme, là voilà qui s'enfonçait tout lentement dans les abîmes de ses rêves, perdue, noyée dans ses désillusions. On aurait dit une déesse qui portait sa croix et qui voulait partir de là, de la terre je veux dire.
C'est alors qu'il s'est passé un truc terrible, inimaginable, je sais pas comment j'ai fait mais je suis sorti de derrière mon buisson et me suis précipité dans l'eau pour aller la rechercher et tout. L'eau était salement opaque et on y voyait que dalle. Je la cherchais comme un fou et j'entendais mon cœur qui battait la chamade dans ce silence qui n'en finissait plus de durer, le con. Le pire dans tout ça si vous voulez vraiment savoir, c'est que moi-même j’me sentais tout d'un coup particulièrement bien, paumé dans les profondeurs du lacs. Je m'imaginais déjà ce qu'on écrirait dans la presse, à savoir que deux amoureux s'étaient noyés volontairement dans le lac parce qu’ils pouvaient pas s'aimer à cause de nos parents qui ne comprenaient pas notre amour. Un truc genre Roméo et Juliette. Et puis, tous les gosses du quartier, ils se raconteraient de génération en génération en génération notre histoire, comme ça, tous les deux, on serait une légende, ouais, une légende. Et immortels en plus.
Et puis j'ai vu comme de la lumière. Waouh, je sais pas d'où ça venait mais c'était super éblouissant de sorte que j'ai pu apercevoir ma Juliette. J'lui ai pris la main, j'lai tiré super fort et voilà qu'à peine une heure plus tard, on était là, assis sur le quai, sur ces vieilles planches en vieux bois pourri et qui craquaient au moindre pas ou geste que l‘on faisait. On était là, on avait même pas froid.
Y'avait les rayons du soleil qui commençait à se lever et à nous éblouir. Mon cœur battait un milliard de fois plus vite que comme d'habitude et comme un papillon sur une épaule, j'lui ai passé mon bras autour de son cou. Alors là, c'est carrément devenu magique. J'voyais plus que ces yeux et j'vous parierai ce que vous voulez que elle, elle se noyait dans les miens, si je puis dire. Elle m'a prit la main - que j'avais fais exprès de laisser traîner à côté de moi au cas où - de ses si jolis petits doigts tout mignons, et puis avec mon autre main je lui ai caressé les cheveux tout doucement, pour pas lui faire mal. Nos regards étaient comme qui dirait en éruption, et nos bouches, enlacées. Bref, la fusion était devenue totale. La perfection de deux corps et de deux âmes qui n'en faisaient alors plus qu'une. L'univers brûlait au creux de nos pupilles et les galaxies infinies étaient le sang dans nos veines. C'était en quelque sorte la symbiose du soleil et de la lune, de l'éclat et de l'étoile, de la fleur et du papillon. L'harmonie de l'instant, l'éternité du présent, en floraison de nos émois.
Vous pouvez dire c’que vous voulez mais si vous voulez mon avis, sûr que ce soir-là, entre Justine et moi, sûr que le paradis n'était plus très loin d'ici...

Le Sexe
Y'avait de la neige partout. Partout. Il faisait sacrément froid. Les rues étaient toutes blanches. On aurait dit qu'il y avait des draps blancs qui recouvraient tous les murs de la ville entière. Comme il faisait froid, Justine avait pris ses petits gants en laine blanche qui la rendait si mignonne. On voyait bien que Justine savait qu'elle était jolie et tout mais c'était une chouette fille quand même. Et puis on s'amusait drôlement bien tous les deux. On se baladait souvent la nuit dans les rues éclairées par tous ces néons des magasins. Y'en avait de toutes les couleurs : des verts, des roses, des bleus. C'était drôlement beau à voir. Justine, c'était une fille qui riait tout le temps maintenant et qui aimait tout faire tout le temps. On s’faisait des cinés -des films pourris, bien sûr-, des ballades, de la patinoire et plein de choses de ce genre-là mais ce soir-là, non, vraiment, rien ne m'avait préparé à ce qui allait se passer.
Il devait être vers les cinq heures du soir quand elle m'a appelé. Elle m'a dit que ses parents partaient en week end à la montagne, à Saint quelque chose, je me rappelle plus très bien où... elle m'a aussi dit que je pouvais venir à partir de huit heures et que l'on serait tout seuls chez elle et tout. Et quand elle disait tout seul, c'était pas le genre de tout seul qu'on balance comme ça par hasard, sans faire exprès je veux dire. Bref, à sept heures et demi pétantes, j'ai pris mes gants, mon écharpe tricotée par ma grand mère et mon bonnet bleu qui m’allait si bien et j’suis sorti sous ce sale temps pourri. Comme j'étais un shouia en avance, j'en ai profité pour m'asseoir sur un banc et j'regardai les étoiles briller dans la nuit noire. J'pensais à Justine et au fait qu'elle était quand même drôlement belle pour une fille de son âge -elle avait maintenant vingt ans et ça faisait bien trois ans qu‘on se connaissait.
J'suis arrivé devant chez elle et j'allais frapper à la porte quand j'me suis rappelé qu'elle m'avait dit au téléphone de pas le faire, que la porte serait justement ouverte. Alors j'ai pas frappé. La porte grinçait drôlement mais je suis sûr que c'était en quelque sorte fait exprès, comme ça elle savait que j‘étais là. Justine était dans sa chambre. Elle m'a dit de monter et qu'elle m'attendait. J'me suis alors déchaussé et j'ai ôté mon blouson que j’ai posé sur ce fauteuil en cuir rouge très chouette. Il faisait sacrément chaud chez elle. Je sais pas si c'était la chaleur ou quoi mais j'suais à grosses gouttes comme jamais j'avais sué de ma vie. Et plus je montais les escaliers, plus j'entendais la voix de Justine. Elle me disait "viens, viens... Monte vite s‘il te plait, je n‘en peux plus…" et le tout d'une voix sensuelle et tout. Attention, pas le genre de voix innocente qui est faite par hasard, mais le genre de voix innocente qui est justement faite pour ne pas être si innocente que ça, si vous voyez ce que je veux dire… Waouh, j'en pouvais plus, j’étais comme qui dirait en chaleur et puis je l’ai vu. Elle était là, allongée sur son lit, dans une robe rouge tout ce qu'il y avait de transparent.
J'me suis alors assis à côté d'elle, et, doucement, de ses jolis petits doigts tous mignons, elle déboutonna un à un les boutons de ma chemise, puis ceux de mon pantalon. J'étais nu, complètement nu je veux dire. Alors j'ai enlevé sa robe à elle aussi. Elle était si belle. Le corps d'une déesse. Ni plus ni moins. Ses lèvres se collèrent contre les miennes et on n'avait toujours pas dit le moindre mot. Dans nos regards, y’avait une telle intensité que parler ça aurait servi à rien, et puis parler pour quoi dire ? Donc j'me trouvais là, et c'était drôlement beau. C'était pur je veux dire. Voyez, dehors y 'avait toute cette société, toute ces usines, ces fumées, ces voitures qui roulaient à toute vitesse, ces gens qui couraient dans tous les sens, et nous, nous, on était là, et on se regardait, et on s'embrassait. Sa bouche descendit là où y'a ce truc supposé interdit -vous savez, cet endroit vachement intime dont on évite toujours de nous parler quand on est môme mais qu’on sait quand même ce que c’est et surtout à quoi ça sert - eh ben c'était pas sale et tout, non, c'était juste de l'amour. Ouais, c'était la vie. On était baignés comme dans une source de lumière dans laquelle nos corps transis s'abreuvaient et s'abreuvaient à l'infini des temps. Ses mains me caressaient, me parcouraient. Elle était si pulpeuse, si parfaite, encore mieux que dans tous mes rêves, et dieu sait si j'en ai rêvé, de cet instant là... C'est clair que c'était du sexe, mais c'était d'abord de l'amour et tout.

Les gens disent qu’il y’a des choses qui se font pas mais moi je préfère les faire parce que Justine dans mes bras, Justine partout en moi et dans moi, c'est d’abord l’acte de l’amour qui s'accomplit. Je veux dire si on a envie de faire ça ou ça, faut pas se retenir, faut pas être gêné ou quelque chose comme ça, faut le faire et puis le vivre. Intensément. Parce que on sait jamais si il y en aura d’autres, de ces moments-là. A la limite -et même pas à la limite du tout d’ailleurs- c’que les autres y pensent, on devrait tous s'en foutre. Après tout, on a qu'une seule vie, non ?
Cette nuit-là, on a tout fait. C'était drôlement chouette. Si je pouvais recommencer, je le referais tout de suite. C'était beau, c'était sale mais c'était surtout pur.
C'était Nous. Juste Nous.

Epilogue
C'était le jour de Noël. Vous savez ce fameux jour où tout le monde dit que c'est LE jour où y faut faire des cadeaux. Comme si les autres jours ils comptaient pas puisque apparemment les gens y savaient pas que l'on pouvait faire des cadeaux tous les autres jours. On était donc en plein hiver et j'me baladais dans les rues. Et ça faisait sacrément drôle de se balader parce que ce jour là, les rues avaient pas un seul centimètre de vraie neige. De la neige, ça faisait bien une semaine qu'il en était pas tombé et on aurait dit que les gens étaient tristes rien qu'à cause de ça. Pas des gars qui dormaient dans des cartons tout pourris et tout gelés, non ça, c'était pas grave. Fallait juste de la neige, pour faire comme si en quelque sorte. Genre tu files une peluche qui aurait un bras ou une jambe en moins à un gamin de cinq ans et alors le gamin, il remarque que le bras ou la jambe qui manque, alors que le plus important, ça demeure quand même tout ce qui reste. Sauf que là, les gamins, ils avaient bien cinquante -au moins- et que leur jouet si on le leur réparait pas, eh ben leur foutu noël, il serait pratiquement gâché. Je dis pratiquement parce qu'il reste encore ces fichus cadeaux qui sauvent le coup
.
Bref, y'avait des lumières partout dans la rue et des guirlandes sur les sapins qu’avaient rien demandé. Au fond ce qui m'énervait le plus c'était les marchands. Bon, c'est sûr, si le gars à la caisse, il te sourit et tout c'est qu'il veut le vendre son satané machin -et, après tout, c’est plutôt logique quand on y pense- mais là, ça battait tous les records. Les mecs, les marchands je veux dire, on aurait dit qu'ils faisaient un concours de sourires. Suis sûr qu'ils devaient se péter les zygomatiques à sourire comme ça, les crétins. Parce que j‘vais vous dire un truc. Si on vraiment, je dis bien vraiment envie d‘acheter un cadeau ou quelque chose dans ce genre, eh bien, que le type, le marchand, qu’il me sourit ou pas, pour moi, ça m‘est complètement égal. J‘veux dire, si je rentre dans un magasin de cadeaux -spécialement à noël- c‘est quand même à coup sûr pour acheter un cadeau et pas pour voir la tronche du mec, si il me sourit ou pas.

Alors, après ça, j'suis allé dans le parc où Justine et moi on s'était embrassé pour la première fois et j'me suis comme qui dirait assis sur un banc. Le lac était complètement gelé. Y'avait même des gamins en plein milieu qui sautaient comme des fous pour voir si ça craquerait pas la glace et quand bien même ça craquerait, les gamins, y seraient encore fichus de dire que c'est pas de leur faute. Et puis y'a leur mère à chacun et qui gesticulent dans tous les sens parce que elles ont drôlement peur qu'il arrive un truc moche à leur rejeton. J'suppose que c'est ça d'être mère. En tout cas, c'est pas moi qui irait les chercher leurs mômes si jamais ça craque.

A ce stade de mon histoire, je pari que vous vous demandez sûrement ce qui est arrivé à Justine et à moi. Le truc c'est qu'il y a jamais eu de Justine puisque c'est moi qui l'ai inventé. Enfin disons plutôt que c'est une héroïne dont j'ai écrit pour de vrai l'histoire et qui serait ma copine idéale. Parce que j'suis tellement timide et maladroit avec les filles et j'ai tellement peur qu'elles rient de moi si les dragues ou quoi, que j'préfère encore écrire ma propre histoire, comme ça , je suis sûr qu'il m'arrivera que des trucs cols -du moins, seulement si je veux que ce soit cool. Bon c'est sûr, ça va certainement en faire rigoler deux ou trois crétins mais je m'en fou. Parce que Justine, c'est ma meilleure amie et qu'elle le restera pour toujours.
En tout cas, une chose est sûre, j'aurais bien voulue la rencontrer. Elle m'a d'ailleurs écrit un poème vachement chouette mais terriblement dur. Ca parle de la solitude et tout. De tout ce qu'on ressent à l'intérieur de soi. Ca dit ça :

La petite fille est morte
C’est encore l’hiver qui la porte
Elle se disait que son feu devenait froid
Elle se disait qu’elle finirait bien par vieillir.
A toi qui me lis, mon ami
Je t’en prie, surtout ne m’enterre pas comme ça
Pense à celle qui s’est éteinte ici-bas
Car tu le sais, je connais toutes tes souffrances
Je connais toutes tes peurs, tous tes pleurs
Je sais exactement ce que tu ressens

J’en ai bien trop souffert
J’ai bien trop souffert pour pouvoir continuer
A exister
De toute façon, personne ne m’en voudra
De toute façon, plus personne ne me pleurera
Je t’en prie, aime-moi, aime-toi
Aide-toi, aide-moi
L’amour est le seul destin
L’amour est le seul chemin…
Waouh c'était trop fort. Carrément génial même si c‘est, il faut bien l‘avouer, super triste. J'avais jamais lu un truc comme ça. Remarquez, de sa part, ça m'étonne pas trop. Surtout quand on la connaît comme je la connais. Justine je ne l'ai jamais oublié. Y'a toujours une de ses lettres qui reste caché au fond de la poche de mon pantalon. Justine, c'était ma seule amie. Ca y est, j’en étais sûr. J'vous l'avait bien dit que ça allait craquer cette foutue glace. Bon, bougez pas, je reviens dans cinq minutes, du moins si vous êtes encore là.
tirée du recueil de nouvelle et poemes de p.pacaly, "L'Amour-Eux"
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